CHRONIQUE DE SLURPY ET LOUVE
Louve
C’est de nouveau avec un livre de Jean Luc Marcastel que je poste une chronique aujourd’hui, tout simplement parce que son style d’écriture bien à lui m’a conquis définitivement, si bien que je ne regrette pas d’avoir acheté Le Dernier Hiver qui est un livre de science-fiction plutôt original, et, ma foi, très plaisant !
Aurillac, France
Mardi 4 Juillet 2035
14 h 30
– 31°
Le Monde est engloutit sous une masse effroyable de neige depuis que le soleil à été caché par des déchets cosmiques. Les gens vivent dans un éternel crépuscule. Mais, avec les radiations, en plus du froid dangereux et dévorant, les Pins attaquent et recouvrent tout sur leur passage. Des immenses forêts de Pins vampires, qui sucent le sang de leurs victimes pour prendre des forces : la Malesève.
Bientôt, Aurillac sera englouti par la neige et les arbres. Mais Johan souhaite traverser cette forêt cannibale pour retrouver son aimée, Léa, qui s’est installée dans une autre ville, près de Bordeaux. Son frère l’accompagne, ainsi que Fanie et Khalid. Ensemble ils vont traverser les ténèbres.
Leurs ténèbres.
Dans ce livre, écrit à la troisième personne du singulier et au passé simple, les points de vue sont partagés entre chaque personnage, sans pour autant être tout à fait égal et proportionnel. En effet, Théo, le frère de Johan (je vais faire un point sur les personnages, pas de panique) est celui que l’on suit le plus, du moins c’est mon impression. Chaque pensée était approfondie et tous les personnages avaient une vraie personnalité, travaillée, toujours différente, originale sans tomber dans le farfelu, point que j’ai beaucoup apprécié.
L’histoire, elle, était vraiment fluide, avec des tournures de phrases poétiques et parfaites, des métaphores régulières, sans aucune répétition. J’ai trouvé la lecture fluide et facile bien que l’écriture soit très évoluée et modelée. J’aime vraiment beaucoup le style de Jean-Luc Marcastel. Il a vraiment un don pour tourner les phrases, choisir les bons mots et expliquer les sentiments des personnages.
« Les gens ne veulent pas réfléchir, ni regarder la vérité en face, c’est trop difficile, ça fait trop mal. Ils veulent des réponses simples à des questions compliquées »
En parlant des personnages, les voilà :
– Johan/Corbeau, personnage énigmatique et très intéressant. Johan à en effet, suite à de nombreuses blessures psychologiques formé autour de lui une carapace invisible (Corbeau) qui l’empêche de ressentir quoique se soit et le rend donc invulnérable, froid et distant, même si Johan se laisse aller à apparaître le plus souvent, en compagnie de ses amis. Il décide de tout quitter pour retrouver Léa, sa fiancée.
– Khalid, jeune marocain rieur et blagueur qui choisit de partir par amitié avec Johan pour sauver Léa, même s’il il doit laisser Sarah, sa petite amie.
« – Savoir ce que j’étais. Un Arabe ? Un Berbère ? Un Français ? Un beur ? Un Français issu de l’immigration ? Un musulman ? Un gris ? Un bougnoule ?
– Et ta réponse, c’est quoi ?
– Un homme. »
– Théo, le frère de Johan, mon personnage préféré, bien que je les aime tous. Jeune militaire qui revient de sa base et part avec ses amis et son frère, par amour. SPOILER On découvre au fil des pages qu’il est fou amoureux de Fanie, qui ne le sait pas, sauf à la fin. Il meurt en restant aux côtés de Laure, qu’il finit par aimer. /
– Fanie, jeune fille courageuse, agile, à la langue bien pendue SPOILER qui quitte sa famille (qui ne l’aime pas) pour accompagner les autres dans leur quête. Elle est folle amoureuse de Johan, qui ne le sait pas, sauf à la fin. On découvre qu’elle détient un pouvoir dû aux radiations du soleil. /
« Quand on boit, on parle trop et on dit des trucs qu’on regrette après. »
– Léa, la fiancée de Johan, qui est partie vers l’Ouest avec sa famille afin d’échapper à la Malesève (voir paragraphe suivant) SPOILER Elle est morte, tuée par un mage fou. /
– Sarah, la petite copine de Khalid, issue d’une famille bourgeoise et raciste, qui accepte le départ de son amoureux avec compréhension.
– Laure, petite sœur de Léa SPOILER Folle amoureuse de Théo, qui ne l’a jamais sut, sauf à la fin, où seule survivante de sa famille, elle meurt après s’être pris une balle. /
Enfin, pour ceux qui ont lus les spoilers, vous avez pus voir qu’il y avait un cercle amoureux plutôt vicieux et infernal, bien que tout se résolve à la fin, un peu répétitivement mais bon.
« Alors seulement elle l’entendit murmurer un mot, un nom qui s’enfonça dans sa poitrine comme une lame de glace :
– Léa… »
Dans ce livre, j’ai été très étonnée du nombre de rebondissements originaux et inattendus qui surviennent dès qu’il y a besoin. Toujours de l’action, des découvertes ; des horreurs, un livre particulièrement prenant.
SPOILER Par exemple, des blessures de « guerre », des déclarations d’amour, des morts, des loups-humains, des fantômes suceurs d’âmes, des découvertes, des mages démoniaques, des machos dangereux… /
Toujours plus de nouveautés et de découvertes, très bien trouvées !!
On pourrait presque dire que ça part dans le registre du fantastique, mais les indications et les raison du fantastique (SPOILER Le pouvoir de Fanie par exemple, qui consiste à déchiqueter des gens avec des ombres /) sont tirées de faits possibles et rationnels dans le contexte.
Par rapport à la fin, rien à redire, bon, oui, j’ai versé ma petite larme et j’ai été émue par les effusions amoureuses, et même si (SPOILER Laure et Théo meurent /) ça reste une fin heureuse :)
« Auprès d’elle, il pouvait se laisser aller. Auprès d’elle, sa carapace de logique se fissurait, ruisselait comme la neige à la flamme pour le libérer, enfin.
– Léa, où est-tu ? »
Note : 9,75/10
Slurpy
Ce livre a été pour moi un coup de cœur, et j’ai été complètement prise par le récit, entraînée par les mots Jean-Luc Marcastel, par ses phrases toujours aussi joliment tournées, et par l’histoire captivante qu’il a ficelé.
Le monde où les héros évoluent est tout simplement génialement imaginé, tout comme l’idée de l’éclipse éternelle qui impose un Crépuscule permanent à ce même monde. Un monde où la plupart des humains sont passés du statut de prédateur à celui de proie. Un monde où les hommes ne croient plus en leur survie.
« À quoi bon sa battre, alors que l’univers entier a juré votre perte ? »
Un monde où le danger est présent partout, dans chaque ombre, chaque flocon qui tombe du ciel rouge sang.
Un monde où les hommes sont contraints de s’adapter. Certains profitant de cette apocalypse à leur profit, devenant cruels, brutaux, en bref : de véritable monstres ; SPOILER certains acquérant un pouvoir extraordinaire, comme celui de Fanie / ; d’autres encore, mutant d’une manière irrévocable, humains se transformant en créatures fantastiques et prédatrices, ou animaux évoluant dans un corps plus apte à survivre dans les conditions qu’impose cet hiver éternel.
« Ce monde, pas plus que ceux qui le peuplaient à présent, ne leur laissaient le choix. Il fallait se battre ou subir. »
Il y a beaucoup à dire sur les protagonistes, et Louve en a dit une bonne partie. Je les ai tous appréciés, à différents degrés. Théo, qui a ses principes et qui les respecte ; Fanie, fée eurasienne au caractère volcanique ; Khalid, et sa phrase favorite « Mon grand-père, y faisait des babouches… » ; et enfin, Johan, qui se créé un bouclier contre la souffrance : Corbeau, un être qui prend sa place quand la douleur morale est trop forte (ça fait un peu schizophrène, en fait).
En effet, les personnages sont prisonnier d’une cruelle et complexe chaîne amoureuse qui les enchaîne les uns aux autres. SPOILER Laure qui aime Théo, qui ne le sait pas ; Théo qui aime Fanie, qui ne le sait pas ; Fanie qui aime Johan, qui ne le sait pas ; Johan qui aime Léa… /
« On se ment comme on peut, jusqu’à ce que la réalité vous oblige à la regarder en face. »
Une seule chose ne m’a pas parue très crédible : SPOILER Johan part, entreprend un voyage qui peut se révéler mortel, par amour pour Léa. Et pourtant, à la fin, il aime soudainement Fanie ! Mais il faut lire pour comprendre. L’auteur a su raccorder cette histoire pour en faire quelque chose qui ne choque pas, qui paraît normal, mais j’en viens encore et toujours au même point : JOHAN EST QUAND MÊME PARTI POUR LEA ! Enfin, c’est gros, quand même ; c’est crédible quand on lit mais ça ne l’est plus tellement quand on y réfléchit… /
L’auteur, par les mots qu’il choisit toujours aussi bien, a su faire passer beaucoup d’émotions contradictoires, et ce d’une belle manière.
Une magnifique aventure cruelle, triste mais poignante d’espoir et d’amour, qui confronte le bon comme le mauvais côté de l’humanité.
Note : 9.75/10 (oui, moi aussi).